Kingsman : Services Secrets
Scène de panique après que le super méchant a diffusé le clip de la dernière horreur musicalo-moraliste des Enfoirés
Kingsman : Services Secrets (Matthew Vaughn, 2015)
Kingsman est un bon film de branleur. Type de films à la cool qui marche à l'épate visuelle plus ou moins inspiré des films de Quentin Tarantino, le film de branleur prend le risque de se périmer très vite voire d'être tout simplement une néo-beauferie prétentieuse. A ce titre, Guy Ritchie a su parfaitement illustrer cette tendance avec un certain bonheur (Snatch en 2000) ou pas du tout (le reste de sa filmographie voire par exemple ici)
Mais son acolyte Matthew Vaughn nous apparaît bien plus doué. Peut-être est-ce du à une cinéphilie plus érudite, un talent certain pour construire une histoire et finalement un mauvais goût plus sûr qui laisse une trace d'irrévérence là où Ritchie sombre dans une certaine vulgarité. Ainsi, Kingsman est-il l’adaptation d'une BD de Marc Millar, assez connu pour faire le sale gosse dans le monde des comics de super-héros. Déjà auteur de Kick-Ass en 2010, adapté du même Millar, Vaughn avance en terrain connu. Cette fois, c'est l'univers de James Bond qui est revisité.
En confrontant deux Angleterre, celle des snobs et celle des prolos, mais aussi l'Amérique juvénile et mal élevée au Royaume Uni, raffiné et maniéré, le cinéaste ne manque pas d'aligner les clichés mais le fait avec un panache certain. Il verse aussi dans un populisme abracadabrantesque qui sied aux films hollywoodiens (les politiciens sont inutiles et pourris) mais sans respect pour personne (ainsi même Barack Obama souscrit au plan machiavélique du mégalomane Valentine – Samuel L. Jackson). Surtout, il fait sienne de la misanthropie délirante de Valentine et fait se réjouir le spectateur de quelques massacres perpétrés par une humanité qui se voit réduite à son envie de tuer son prochain. Pour cela, Matthew Vaughn, doté d'un confortable budget, ne recule devant aucun effet mais ne cède presque jamais à la facilité. Certes son pré-générique fait série Z mais la suite est bien plus inspirée. Les scènes d'action sont très vives voire complètement grisantes et l'héritage bondien est bien assimilé et détourné(1). Le cinéaste qui est aussi co-scénariste arrive à raconter la classique naissance d'un héros sans perte de rythme ni lourdeur malgré les deux heures dix. Les deux personnages principaux, Harry Hart (Colin Firth), le mentor, et Eggsy (Taron Egerton), l'élève, sont particulièrement bien cernés. Archétypes du bien né d'un côté et du pauvre cockney vivant dans un fishtank de l'autre, Harry et Eggsy entretiennent rapidement une relation filiale qui tient la route. Il faut dire que Colin Firth en espion bien élevé et ultra violent a une classe incroyable qui ne peut que convaincre le jeune homme flanqué d'un beau-père dégoûtant.
Le film ne dépasse certes sans doute pas son côté fun qui moque le sérieux des blockbusters contemporains. Mais quand un film d'espionnage hollywoodien se conclut par la mine ravie du héros qui va pouvoir sodomiser une princesse scandinave (!), on ne peut s'empêcher de se réjouir de cet esprit potache plutôt revigorant.
nolan
Note de nolan : 3
1 Ce n'est pas nouveau comme l'avait remarquablement démontré Mike Myers dans les trois Austin Powers (Jay Roach, 1997, 1999 et 2002).
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