Black swan
Un chorégraphe suffisant mais charismatique confie à une danseuse perfectionniste les rôles du cygne blanc et du cygne noir pour une nouvelle adaptation du Lac des Cygnes. La surenchère dont le film fait preuve n'empêche pas sa réussite.
La vierge Nina (Natalie Portman) et le satyre Leroy (Vincent Cassel)
Darren Aronofsky ne recule devant aucun effet dans Black Swan, bien au contraire. Aussi charge-t-il son film comme une mule et il serait aisé de faire un inventaire à la Prévert des éléments venant surligner le scénario, les émotions et les caractères dans cette histoire de danseuse perfectionniste à qui l'on confie les rôles du cygne blanc et du cygne noir pour une nouvelle adaptation du Lac des Cygnes (ballet de Piotr Ilitch Tchaïkovski ; 1875-1876). On pourrait également remarquer que cette étoile paraît bien minuscule pour une danseuse de ballet mais qu'importe ! Ce sont les excès de son auteur qui font le sel de son cinéma. Certes Darren Aronofsky peut tomber dans l'indigeste comme l’avait montré The Fountain (2006) – d’où une salvatrice cure d'austérité dans son œuvre suivante (The Wrestler ; 2008). Mais son dernier opus, s’il ploie sous les références, la prétention et l'excès de baroquisme, ne rompt pas. Pourquoi donc ? Bonne question. Sans doute parce qu'en restant accroché au visage de son héroïne Nina (Natalie Portman), les scènes de danse se font oppressantes (mais toujours lisibles), la caméra tournoyant ne croisant les autres protagonistes que par instants. Aussi les personnages secondaires ne sont que des archétypes, des reflets d'elle-même, de ses pulsions, de sa conscience. En misant sur la surenchère, le film noie le spectateur d'informations et de moments spectaculaires et attendus. Par ce biais, Black Swan réussit à totalement lui faire partager la confusion de l’héroïne dans sa séquence finale : d'abord inquiets par sa chute lors du grand soir, nous voilà terrifiés à l'idée qu'elle a peut-être fini par commettre un crime avant qu’elle ne revienne à son destin de cygne blanc promis, depuis le début, par son chorégraphe (Leroy – Vincent Cassel).
La danse sert ici de support à une réflexion sur l'art dont la recherche d’absolu se traduirait par une importante souffrance physique et un irrémédiable dérèglement mental (là où The Wrestler présentait une forme de purification de l'esprit par une autodestruction physique). Dans ce propos, on verra volontiers une mise en abîme concernant une grande partie du casting : la beauté frigide de Nathalie Portman et sa volonté de se/la sexualiser (Closer – Mike Nichols, 2005 et Sex Friends – Ivan Reitman, 2011), la prétention outrée de Vincent Cassel (voir l'ensemble de ses interviews sur la totalité de ses films), la disparition des écrans de Winona Ryder (qui interprète Beth Macintyre, l'ex-étoile). Son réalisateur est un peu tout cela. Imparfait mais séduisant.
nolan
Note de nolan : 3
Note de Ran : 2
Black Swan (Darren Aronofsky, 2010)
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