Contagion
Avec son lot de stars, le film de Steven Soderbergh constitue un fort agréable divertissement, rythmé et très bien mis en musique, qui atteint son but : faire sombrer le spectateur dans la paranoïa. Il est même parfois un peu plus que cela, notamment par le biais du méchant de service, incarné par Jude Law.
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Gwyneth Paltrow en bonne santé
Contagion raconte la propagation d'une pandémie, la réaction des autorités (scientifiques, gouvernementales et militaires), celle des citoyens. Autant dire que Steven Soderbergh ne perd pas son temps pour entrer dans le vif du sujet (le film commence au jour numéro 2 de la propagation de la maladie). Pour cela, rien de tel qu'une star (Gwyneth Paltrow) qui meurt rapidement et dans d'horribles conditions le tout enrobé par un montage nerveux mais pas frénétique. Le film relate les faits de manière très structurée, cherchant à ne pas sombrer dans le pathos sans que l’épaisseur des personnages, pourtant nombreux, ne soit perdue. Aussi, il est aisé de rentrer dans le jeu surtout lorsque celui-ci consiste à alimenter la paranoïa du spectateur. Soderbergh ne recule alors devant aucun effet filmant les contacts, les gens qui toussent, privilégiant les gros plans sur les visages, jouant sur le suspense (la recherche du patient zéro, du quotient de contagion, du vaccin, ...). Pas une scène ne se répète et la montée de la tension et de la panique qui gagne la population est d'une fluidité frappante. Le métrage, quoique bien photographié, prend une allure parfois austère, notamment parce que l'aspect bureaucratique (y compris celui des laboratoires) domine le film, ce qui participe du sentiment de malaise. Pour autant, Soderbergh ne manque pas d'humour, qu'il glisse certes avec parcimonie, mais toujours au bon moment (le découpage du crâne de Gwyneth Paltrow en fournit un excellent exemple). Il procède de même pour faire surgir les moments d'émotions, gardant ses distances et les violons dans les étuis. Mais pour atteindre son but, Soderbergh a du faire des choix. Ainsi, ses personnages sont tous bons. S’ils ne sont pas parfaits, leurs réactions, y compris celles liées à la panique, restent raisonnables, censées. Leurs bonnes actions ne manquent pas et vont dans le sens d'une mise en valeur de l'humanité. Les autres ne sont que des ombres et le film ne contient qu'un méchant. Mais un seul pour s'opposer à toutes ces bonnes personnes nécessite un parfait salaud. En cela, Alan Krumwiede (Jude Law jubile visiblement d'interpréter une ordure) est réussi. Il est dangereux (il vient d'Internet !), il est intelligent (son discours est cohérent mais populiste) et corrompu (il lui faut bien une faiblesse). Pire, il s'en sort ! Soderbergh accepte de faire un film de divertissement que s'il peut déroger à quelques règles. D'ailleurs, n’a-t-il pas pour Alan une relative bienveillance puisque celui-ci finit par apporter – trop tard et après avoir répondu à une interview – des doses de Forsythia qu'il croit (sans en être certain) être le remède à la maladie, à son amie journaliste (Monique Gabriela Curnen) ? De même, n'est-il pas représentatif de la mauvaise conscience des autorités qui cultivent le secret, mais aussi celle d'une population qui, terrorisée, s'autorise les actions les plus répréhensibles ?
Une petite réserve tout de même. Dans la galerie des personnages bons dont la fonction est parfaitement définie, il y a une erreur grossière. La représentante de l'OMS (Marion Cotillard, fort joliment filmée) est un ratage presque complet qui semble – heureusement – avoir été passé à la trappe au montage lorsque le réalisateur s'est rendu compte que son personnage était un ersatz quelque peu gluant de Mère Teresa (version sexy). Mais le mal est fait et la différence – criante – avec les autres protagonistes, dont un Matt Damon très bien en père courage, se fait sentir. Un grand plaisir enfin : la musique du complice de Soderbergh, Cliff Martinez (neuf films avec l'auteur et dont la côte de popularité vient d'exploser avec le récent Drive de Nicolas Winding Refn), se révèle parfaitement envoûtante alors que les sons électroniques viennent renforcer l'ambiance de fin du monde.
nolan
Note de nolan : 3
Contagion (Steven Soderbergh, 2011)
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