L'étrange affaire Angélica
Une merveilleuse histoire d’amour fou entre une femme morte et son photographe, qui provoque un sentiment d’étrangeté aussi vaporeux qu’élégant... Malheureusement, mon attention fut happée par le jeu atroce de son acteur principal. C’est bien dommage.
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De ces plans fixes aux cadrages très travaillés, de ce léger effet spécial donnant du relief à une photo, de l’utilisation du son alliant musique classique et bruit de machine, de cette merveilleuse histoire d’amour fou entre une femme morte (Pilar Lopez de Ayala) et son photographe (Ricardo Trêpa), qu’ai-je retenu ? Malheureusement, mon attention fut happée par le jeu atroce de son acteur principal. Ricardo Trêpa est de presque tous les plans et ne sait jouer ni la surprise, ni la mélancolie. Il n’est même pas capable de faire semblant de boire un café ou tenir un appareil photo. Pire, le reste du casting est de très bonne tenue, ce qui accentue la stupéfiante nullité de cet acteur. Et quelle ne fut pas ma stupeur quand je constatai que Ricardo Trêpa était un habitué du cinéma de Manoel De Oliveira depuis 1999. Alors devant la maîtrise des outils cinématographiques du réalisateur portugais, je ne peux que penser que je fais erreur. Peut-être est-ce une histoire de sensibilité ? Parfois un jeu ne passe pas. Ce fut le cas pour Jennifer Jones dans le grand classique qu’est Duel au Soleil (King Vidor, 1946), dont je trouvais le jeu au bord du ridicule. Pourtant lorsque je l’ai découverte dans la Folle Ingénue (Ernst Lubitsch, 1946), elle était formidable. Est-ce que Ricardo Trêpa est meilleur dans d’autres films ? Peut-être. En tout état de cause, si l’auteur de L’Etrange Affaire Angélica n’était pas celui-ci et si son film ne diffusait pas un sentiment d’étrangeté aussi vaporeux qu’élégant, gardait un ton léger malgré l’amour qui consume le héros, alors j’aurais sans hésiter classé l’œuvre parmi les nanars de l’année grâce à la spectaculaire contre-performance de son acteur principal.
Si j’étais un peu tordu ou de mauvaise foi, j’écrirai que le film ne cesse d’opposer une forme d’onirisme (le visage photographié qui sourit) et de spiritualité à une réalité plus physique (les travailleurs de la terre qui grimacent) et que, par conséquent, son héros se détache peu à peu des hommes jusque dans son jeu. Mais la séquence finale qui voit l’entrée en scène d’un docteur qui joue presqu’aussi mal que lui fait s’écrouler cette subtile théorie. Alors, j’en veux à Ricardo Trêpa (et à son grand-père Manoel De Oliveira) qui me gâchent les moments envoûtants, la bonne utilisation d’effets spéciaux désuets ou cette idée de surcardrer à l’infini son décor principal (une chambre qui, selon l’angle, donne soit sur la porte amenant vers un escalier descendant, soit sur des photographies en face d’une fenêtre ouverte qui montre le ciel et la montagne) qui rime avec cette perpétuelle volonté de fuite qui conduira le héros au plus haut des cieux. Donc, pour paraphraser Pierre Desproges, Ricardo Trêpa est coupable mais son réalisateur vous en convaincra mieux que moi.
Le coupable : Ricardo Trêpa
nolan
Note de nolan : 3
L’Etrange Affaire Angélica (Manoel De Oliveira, 2009)
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