Le Magasin des Suicides
Dans un monde gagné par la déprime, le commerce des Tuvache n’a jamais été si florissant. Logiquement puisqu’il vend à chacun le moyen approprié pour se suicider. Bien que casse-gueule, le sujet du nouveau film de Patrice Leconte est séduisant. A l’arrivée, Le Magasin des suicides n’est qu’un loupé de plus dans sa carrière.
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Lucrèce, Vincent, Alan, Marylin et Mishima Tuvache
Un suicide, au fond, c’est triste. Soit. Il est néanmoins étonnant que Patrice Leconte le martèle d’emblée. Partant, il démontre que s’amuser des tribulations d’un commerce suicidaire a tout d’une fausse bonne idée et choisit de rompre unilatéralement le pacte scellé avec un spectateur qui, lui, voulait y croire. On était en droit d’attendre un conte à la gaieté perverse s’emballant dans une délirante danse macabre ; on en restera loin. S’abattant sur un film souffrant déjà de son graphisme sommaire, d’une animation mollassonne (style bande dessinée) et de numéros musicaux mal exécutés, l’épais voile de malheur recouvre l’ensemble et plombe une machine qui, rapidement, tourne à vide. Y compris lorsqu’est détaillé le bric-à-brac létal (cordes, poisons, sabres…) servant de gagne-pain à la famille Tuvache. L’alléchante exposition fait un flop et l’ennui gagne.
Marylin Tuvache
Un suicide, c’est d’autant plus triste que la vie est si belle. Non seulement, Leconte échoue dans son entrée en matière mais il rate également le second défi proposé par Le Magasin des suicides : trouver une honorable porte de sortie à la – censément noire et savoureuse – situation initiale. Celui-ci, plus que le précédent, était ardu. Il fallait éviter désespoir, cynisme et mièvrerie. Dans la dernière, le réalisateur prend le parti de résolument se vautrer. Alan, dernier rejeton des Tuvache, sourit sans cesse et aime tant la vie qu’il se charge d’en faire découvrir les merveilles à toute sa famille. Prenant conscience de son charme (moyennement évident), sa grande sœur sera la première à connaître la grande révélation. Les autres, y compris le père trop professionnel et légèrement récalcitrant, suivront si bien que l’échoppe morbide sera joyeusement transformée en gargote peu ragoûtante. Une ultime tromperie sur la marchandise à l’image d’un projet finalement sans imagination, ni dans ses gags, ni dans sa morale. Il est vrai qu’il n’est pas facile de rire de la mort. Mais il est surtout dommage de ne pas (savoir ? vouloir ?) saisir l’occasion de le faire…
Mishima Tuvache
Antoine Rensonnet
Note d’Antoine Rensonnet : 1
Le Magasin des suicides (Patrice Leconte, 2012)
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