No
Public cible : votre serviteur est ravi ce mois-ci. En tant que gros pervers, il est allé lorgner Spring Breakers. Et comme il est de gauche bien pensante, il est allé voir No. « Gros pervers de gauche », c'est pas tendance par contre. C'est mieux « petits vertueux de droite » ? Pas sûr.
Gael Garcia Bernal et Alfredo Castro
dans une Renault 11 cabriolet (autant dire le tip-top du hype dans les années 80)
Sur la forme, l'image de No est de type VHS et fait penser aux productions Eurociné[1]. Ça pique parfois les yeux, il n'y a pas d'éclairage, quelques contre-jours dégueulasses et un cadrage aléatoire. Aussi faut-il quelques minutes pour s'habituer à ce filmage – d'époque, écrit-on. Pourtant la mise en scène des archives présentées dans le film (spots de pub, de campagne, …) est plus léchée et le sentiment de transition se fait sentir. Sentiment et idée intéressante soulignés par la présence de quelques figures de l'époque – qui jouent leur propre rôle et ont soudain trente ans de moins une fois à la télévision.
A ce filmage peu commun s'oppose une trame scénaristique classique : celui de l'individu qui va, grâce à son obstination et son talent, mener à bien une mission malgré les réticences de ses proches, supérieurs ou interlocuteurs. En parallèle, la vie de famille du héros est fort compliquée. Avec une construction qui fait songer au récent Argo (Ben Affleck, 2012)[2], Larrain dessine un personnage principal assez complexe. René (Gael Garcia Bernal) est un jeune publicitaire dont la réussite sociale dépend de l'économie ultralibérale pinochienne et qui décide de prendre en charge la campagne de communication de l'opposition au ‘‘vieux’’. En effet, dans le cadre du référendum organisé pour valider la reconduction pour huit ans du général à la tête du Chili, celle-ci se voit offrir quinze minutes d'antenne durant la campagne. René a face à lui diverses figures d'opposition avec son ex-femme Veronica (Antiona Zegers), le réalisateur des spots Fernando (Nestor Cantillana) et quelques anciens du Parti communiste qui ne croient pas à son choix radical : ne pas faire une campagne sinistre qui dénonce les exactions du régime mais retenir une option plus ‘‘Coca-Cola’’ soit des chansons, de l'humour, de la joie. Quant au régime, il est d’abord représenté surtout par son boss Lucho (Alfredo Castro), personnage ambivalent, sympathique et inquiétant qui admire le talent de René et prend, trop tard, les rênes de la campagne du Oui.
Surtout le film est drôle. Ne négligeant pas de restituer le climat oppressant du pays, il opte pour un ton souvent léger et Larrain reprend à son compte l’idée de la campagne : ne pas rendre sinistre un sujet pourtant grave. Il alterne ainsi avec une certaine réussite les coups de matraque et les séquences qui prêtent à sourire. Nous retiendrons surtout l'improvisation des pubards pour justifier la présence de l'arc-en-ciel autour du mot ‘‘No’’ face à la vieille garde du Parti communiste (« socialiste. - Oui, socialiste... »).
nolan
Note de nolan : 2
No (Pablo Larrain, 2012)
[1] Vu, sur le compte twitter du Dr Orlof, quelques exemples dans la bande annonce d'un documentaire sur cette maison de production.
[2] Les films ont aussi en commun un côté nostalgique dans la reconstitution d'une époque récente. Mais ici, les micro-ondes et les skate-boards sont autant des gimmicks d’époque que des traces du simili american way of life du Chili.
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