Robin des Bois
Une nouvelle version de la légende de Robin des Bois, qui plus est réalisée par Ridley Scott. Voilà qui ne manque pas d’être quelque peu alléchant. Et force est de reconnaître que, malgré certaines limites, le film est une réussite où le grand spectacle attendu est au rendez-vous.
Robin des Bois (Russel Crowe)
Robin des Bois est bien – même s’il occupe toutefois une place bien moindre que ce cher comte Dracula –l’exemple même du héros qui a beaucoup inspiré le cinéma. Du Robin des Bois fondateur d’Allan Dwan (avec Douglas Fairbanks en 1922) au Robin des bois, prince des voleurs de Kevin Reynolds (avec Kevin Costner en 1990) en passant par Les Aventures de Robin des Bois de Michael Curtiz (sans doute la version plus célèbre ; avec Errol Flynn en 1938), le Robin des Bois revu et corrigé par les studios Walt Disney (de Wolfgang Reitherman en 1973) à l’excellent La Rose et la flèche de Richard Lester (avec Sean Connery et Audrey Hepburn en 1976 ; la plus originale et la meilleure de toutes les versions) et en oubliant quelques films moins célèbres, le personnage a offert sinon d’excellents du moins de forts bons moments dans les salles obscures. Aussi ne peut-on, a priori, qu’être attiré par cette nouvelle mise en images qui s’annonce à grand spectacle d’autant qu’elle est signée par Ridley Scott, réalisateur certes inégal mais capable, dans ses meilleurs moments, de s’élever au niveau des plus grands (Blade Runner, 1982). Après le visionnage, quelques rapides réflexions et un court bilan sur cette nouvelle version.
Le héros : il est incarné par Russel Crowe, acteur qui, comme le réalisateur, est fort inégal dans ses compositions. Sans être ici excellent, il est toutefois loin d’être d’une totale fadeur. La bonne idée initiale est d’en avoir fait le survivant d’une guerre perdue ce qui, potentiellement, le rapproche des héros de westerns ou des samouraïs perdus alors que les Shogun Tokugawa ont gagné les guerres civiles japonaises dans certains films d’Akira Kurosawa (par exemple Les Sept Samouraï en 1954). Cette caractéristique tient pendant une bonne heure avant de, malheureusement, s’effilocher quand il est confronté à la figure de son géniteur mort et à celle de son père spirituel, Walter de Locksley (incarné par un Max von Sydow qu’on a toujours plaisir à retrouver).
L’intrigue : Ridley Scott et ses scénaristes, Brian Helgeland et Tom Stoppard, ont transformé l’histoire habituelle de Robin des Bois. Ici, l’enjeu n’est pas de réinstaller Richard Cœur de Lion (Danny Huston) sur le trône usurpé par le prince Jean (Oscar Isaac, très décevant) mais que l’Angleterre résiste à une attaque française du roi Philippe Auguste menée par le traître Godefroy (Mark Strong, qui, après Sherlock Holmes de Guy Ritchie et Kick-Ass de Matthew Vaughn, cumule décidément – toujours avec un talent certain – les rôles de méchants depuis le début de l’année). Celui-ci est donc le grand méchant en lieu et place de l’habituel shérif de Nottingham (Matthew Macfayden). On notera que tous ces changements (ce qui ne rapproche d’ailleurs en aucun cas cette nouvelle version d’une quelconque vérité historique) n’enlèvent rien mais n’apportent pas grand-chose. Un temps pourtant, on espère une réflexion quelque peu shakespearienne (en fait, tant que Richard Cœur de Lion n’est pas mort) autour du pouvoir, de sa charge et de son illusion mais celle-ci s’estompe vite. Dommage mais l’intrigue parvient, malgré tout, à tenir haleine mais on cherchera vainement une ouverture métaphysique. Mais, après tout, il faut savoir s’en contenter…
Le spectacle : autant le dire, c’était lui qu’on était venu chercher en premier lieu dans ce Robin des Bois. Et force est de reconnaître qu’il est au rendez-vous. Les scènes de batailles – même si aucune n’est absolument mémorable – sont fort nombreuses et toujours bien filmées rythmées. On sent que le réalisateur a bénéficié d’un financement assez important et qu’il a su en tirer le meilleur parti. Le talent formel de Ridley Scott est donc toujours bien présent et le film, pourtant fort long (près de deux heures et demi), ne présente guère de baisse de rythme si ce n’est peut-être une, très légère, dans la quatrième demi-heure.
La Femme : On veut parler de Lady Marianne, ici incarnée par Cate Blanchett, élément indispensable de la réussite d’un Robin des Bois. En beauté froide, déjà un peu fanée (qu’elle me pardonne… mais Russel Crowe n’est pas tout jeune non plus) et en figure sacrificielle, elle est tout-à-fait convaincante. Un fort bon point donc même si son histoire d’amour avec Robin (qui, pourtant, commence par de bonnes idées notamment cette nécessité qu’ils ont de se toucher – mais non de se caresser – et de partager une chambre commune) est assez mal traitée et le moment où leurs sentiments s’affirment se fait peut-être par trop en douceur.
Ainsi, au final, le bilan est-il, pour reprendre le mot de Georges Marchais (qui parlait de l’expérience soviétique) mais en étant sérieux et honnête, « globalement positif ». Certes, ce Robin des Bois n’a rien d’un chef d’œuvre mais c’est tout de même un divertissement – et surtout du grand spectacle – de fort belle facture (notamment du point de vue visuel) qui se situe, malgré quelques limites, très largement au-dessus de la moyenne des blockbusters hollywoodiens. Bref, un fort bon moment de cinéma.
Ran
Note de Ran : 3
Note de nolan : 2
Robin des Bois (Ridley Scott, 2010)
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