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Super 8

3 Septembre 2011 , Rédigé par nolan Publié dans #Critiques de films récents

Un drôle de projet : faire revivre le cinéma de Spielberg des années 70/80. J. J. Abrams échoue à dépasser les limites de l'exercice de style mais livre un film de très bonne qualité. Un divertissement bien construit aux personnages attachants.

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Attention nostalgie pour les trentenaires : faire revivre le cinéma de Spielberg de la fin des années 70 et du début des années 80. Canonisation, donc, d'un auteur encore actif qui produit lui-même son petit hommage...

D'apprentis cinéastes prépubères projettent de tourner quelques scènes en extérieur de leur film de zombies avant qu'une histoire de grandes personnes surgisse, plus fantastique encore que leur projet cinématographique.

Nous sommes en 1979 et la caméra super 8 de notre Hitchcock en herbe impressionne le souvenir d'un déraillement spectaculaire et de la présence d'un visiteur peu amène avec la population.

Ici, le film pourrait être sous-titré E.T. rencontre les Goonies et les clins d'œil à la galaxie Spielberg des années 80 ne manquent pas. Difficile pour le réalisateur de marquer le film de son empreinte tant l'hommage se fait dans le respect total de son modèle. Steven Spielberg est à la production et, on le sait, peut parfois s'incruster très largement dans le processus de création du film. Aujourd'hui, on lui reconnait davantage la paternité des Goonies (1985) qu’à son réalisateur, Richard Donner, pourtant précedemment aux commandes de deux gros succès commerciaux (Superman en 1978 et Ladyhawke en 1984)(1). Il n'en fut pas de même pour Robert Zemeckis et Joe Dante qui réalisèrent plusieurs films estampillés Amblin(2). Le premier a vécu sa meilleure période sous l’égide du papa d'Indiana Jones mais a su imposer son style quand le second en fut une version insolente et réjouissante, désormais auteur de projets plus confidentiels mais respectés.

 

super-8.jpg

Elle Fanning et Joel Courtney devant Riley Griffiths

 

Abordons donc les marottes de l’auteur de Duel (1970) que celui de Lost (2004 – 2010) a développées avec plus ou moins de bonheur. Au rayon des déceptions, il y a quelques personnages qui peinent à exister : les pères. Ils sont deux – Jackson Lamb (Kyle Chandler) et Louis Dainard (Ron Eldard) – l’un veuf et l’autre divorcé, qui ne s’aiment pas et le moins que l'on puisse dire est que l'éducation de leur progéniture n'est pas forcément le domaine dans lequel ils sont le plus à l'aise. Cependant, nous n'aurons pas grand-chose d’autre à en tirer qu’une opposition à la Roméo et Juliette (William Shakespeare, 1597) – leurs enfants s’aiment – et quelques actes de bravoure pour faire avancer l'histoire (mine de rien, les enfants ont besoin d'eux, ne serait-ce que pour les prendre dans leurs bras ; ils ne demandent que ça).

Joe Lamb (Joel Courtney), le jeune héros, de par sa position de mec sympa, réfléchi et mignon, ne va pas forcément emporter l’adhésion du spectateur sauf lorsqu’il se trouve face à Alice Deinard (Elle Fanning) dont il est follement amoureux. Lui filmé comme un petit garçon, elle comme une femme, le décalage est plutôt bien rendu (notamment lors d’une scène de maquillage). Ainsi, Joe aura plus de facilités à faire le deuil de sa mère une fois qu’il aura sauvé Alice des griffes du monstre. Une petite étrangeté néanmoins : ils ont quand même douze ans, c’est l’âge pour se rouler des pelles et notre petit couple n’aura même pas le droit à un petit bisou sur la bouche !

Contrairement à E.T. (1982), l'alien est ici loin d’être inoffensif et très peu montré. Si les adultes sont responsables du chaos qui va survenir, le visiteur est du genre énervé et sait faire du dégât quand il le faut. Il faut donc regarder vers les Dents la mer (1975) à ceci près que notre monstre veut rentrer à la maison et n’est pas une métaphore sexuelle. Au fond, il en a un bon (l’alien creuse beaucoup, n’appréciant que modérément la compagnie des hommes). 

Tout ceci se regarde sans déplaisir mais c’est dans le tournage du film de zombies et son résultat durant le générique de fin que se trouvent les éléments les plus séduisants. En tout premier lieu, il y a le gros réalisateur Charles Kaznyk (Riley Griffiths) qui filme sans scénario sentant que l'histoire va venir à lui. C’est lui qui convainc la blonde et rebelle Alice de tourner dans son film. C’est un personnage drôle, intelligent, autoritaire, complexe et complexé et qui traduit par des aspects ce que les auteurs pensent d'eux-mêmes et de certains de leurs collègues (bien sûr, il figure une caricature d’Alfred Hitchcock). Le reste de l’équipe ne manque pas de piquant et la débrouillardise de ces jeunes créateurs fait plaisir à voir. Aussi le film qui nous est présenté à la toute fin créé une réelle complicité avec le spectateur qui a suivi son processus de création (sans pour autant y avoir participé) et regarde l’œuvre avec la compassion d’un parent, la nostalgie de l’enfance et une obligatoire mise en abyme, ces zombies n’ayant rien à envier au monstre des deux premières heures puisque, hormis une différence très notable de moyens et de technique, il préfigure le conte fantastique que nous venons de voir.

 

nolan

 

Note de nolan : 3

Super 8 (JJ Abrams, 2011)


(1) On pourra aussi se reporter à notre note sur Le secret de la Pyramide (Barry Levinson, 1985).

(2) Boite de production de Steven Spielberg.

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F
<br /> <br /> Je trouve vraiment le travail sur l'enfance plus profond que chez Spielberg. Je ne détaille pas, je t'invite à lire ma critique XD (pub).<br /> <br /> <br /> Pour les autres films que tu cites, je comprends ta pensée mais je ne les connais pas (mis à part Les Incorruptibles et Scarface)^^<br /> <br /> <br /> <br />
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N
<br /> <br /> A vrai dire, je n'ai pas bien vu ce qu' Abrams ajoutait comme je fus dubitatif sur les hommages de Palma à Hitchcock (Obssesion en 1976 ou Body Double en 1984). Ce n'étaient pas<br /> de mauvais films mais finalement trop ancrés dans l'hommage. Je trouve que c'est pareil pour Super 8 malgré toutes ses qualités. Aussi quitte à se lancer là-dedans, je trouve la démarche<br /> de Van Sant (Psycho, 1998, remake en couleur mais plan par plan) plus cohérente et qui implique finalement une plus grande prise de risque. Chez De Palma, qui aime - à l'instar de son<br /> premier fan Q. Tarantino - la citation, c'est son faux remake de Blow up d'Antonioni (Blow out en 1981) qui m'a littéralement scotché et m'a révelé le vrai talent du cinéaste<br /> (je n'avais pas encore vu Scarface  - 1983 - ni Les Incorruptibles -1987-, excellents également). Donc, j'irai voir les prochains films de JJ avec plaisir et on verra bien<br /> ce qui passe...<br /> <br /> <br /> <br />
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F
<br /> <br /> Un excellent film. J'ai surtout retenu le travail inscrusté sur pellicule autour de la fugacité de l'enfance et le passage à l'âge adulte symbolisé par ce monstre aux yeux maternels. Mais je<br /> pense que Abrams parvient à imposer sa patte sur celle de Spielberg. Il va au-delà de l'hommage cliquant et vain, il y a une réelle sensibilité d'auteur et de réalisateur.<br /> <br /> <br /> <br />
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