Questionnaire Godard
Proposé par Vincent d’Inisfree qui souhaite lui rendre un juste hommage à l’occasion de ses quatre-vingt ans, voilà un questionnaire consacré à Jean-Luc Godard. L’occasion de me rappeler quelques très grands moments de cinéma et de constater mes criantes lacunes concernant l’œuvre majeure d’un immense auteur.
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Jean-Luc Godard (né en
1930)
1) Quel est votre plus vieux souvenir d'un film de Jean-Luc Godard ?
C’est un peu confus mais je suis persuadé que le premier film de Jean-Luc Godard que j’ai eu l’occasion de découvrir est A bout de souffle (1960).
Affiche d’A bout
de souffle (1960)
2) Et le plus récent ?
Cette année, j’ai eu l’occasion de revoir Alphaville, une étrange aventure de Lemmy Caution (1965).
Affiche d’Alphaville, une étrange aventure de Lemmy Caution (1965)
3) Le plus beau plan ?
Pour moi, la plus belle séquence reste celle d’Alphaville, une étrange aventure de Lemmy Cautiondurant laquelle les mains de Natacha von Braun (Anna Karina) passent devant le visage de Lemmy Caution (Eddie Constantine).
Lemmy Caution (Eddie
Constantine) et Natacha von Braun (Anna Karina)
dans Alphaville, une étrange aventure de Lemmy Caution
J’aime aussi beaucoup ce plan du Mépris (1963) – même s’il est loin d’être le plus beau – qui montre Fritz Lang (qui joue son propre rôle), légende des âges d’or des allemands et américains , en train de traverser Cinecittà, Mecque du cinéma italien. Sachant qu’il est filmé par le réalisateur-phare de la Nouvelle Vague, c’est un peu comme si toute l’histoire du septième art était réunie en une seule image.
4) Le plus beau son ?
C’est la poésie – récitée par Natacha von Braun (en voix off) – qui accompagne la séquence dont je parlais à la question précédente. Elle est composée de différents vers extraits de l’œuvre de Paul Eluard qui ont été recollés par Godard (et son cinéma est peut-être d’abord un art du collage qui tente et réussit à intégrer des éléments venant d’autres arts pour former un nouveau poème ; le voici :
« Ta voix, tes yeux, tes mains, tes lèvres, Nos silences, nos paroles, La lumière qui s’en va, la lumière qui revient, Un seul sourire pour nous deux, Par besoin de savoir, j’ai vu la nuit créer le jour sans que nous changions d’apparence, Ô bien-aimé de tous et bien-aimé d’un seul, En silence ta bouche a promis d’être heureuse, De loin en loin, ni la haine, De proche en proche, ni l’amour, Par la caresse nous sortons de notre enfance, Je vois de mieux en mieux la forme humaine, Comme un dialogue amoureux, le cœur ne fait qu’une seule bouche Toutes les choses au hasard, tous les mots dits sans y penser, Les sentiments à la dérive, les hommes tournent dans la ville, Le regard, la parole et le fait que je t’aime, Tout est en mouvement, il suffit d’avancer pour vivre, D’aller droit devant soi vers tout ce que l’on aime, J’allais vers toi, j’allais sans fin vers la lumière, Si tu souris, c’est pour mieux m’envahir, Les rayons de tes bras entrouvraient le brouillard. » |
Sinon (et même si ce n’est pas la question), le plus mauvais son, c’est sans aucun doute celui du court-métrage Charlotte et son Jules (1958). La postsynchronisation n’est pas très bonne et surtout Jean-Paul Belmondo (parti faire son service militaire) est doublé par Jean-Luc Godard. Je suppose qu’à l’époque, quand ni Godard, ni Belmondo n’étaient encore ce qu’ils allaient devenir, cela devait moins choquer mais, aujourd’hui, cela provoque une sacrée surprise quand on a l’occasion de découvrir l’une des premières œuvres de Godard (par ailleurs nettement moins intéressante que Tous les garçons s’appellent Patrick, ou Charlotte et Véronique – 1957).
Charlotte (Anne
Colette) et Jean (Jean-Paul Belmondo)
dans Charlotte et son Jules (1958)
5) La plus belle réplique ?
Il y en tant mais va pour celle-ci – extraite d’Alphaville, une étrange aventure de Lemmy Caution :
« Alpha-60 : Savez-vous ce qui transforme la nuit en lumière ? Lemmy Caution : La poésie ». |
Lemmy Caution
interrogé par l’ordinateur Alpha-60
dans Alphaville, une étrange aventure de Lemmy Caution
Par ailleurs, pour des raisons très personnelles et qui n’ont donc que peu à voir avec Godard, celle de Fritz Lang dans Le Mépris, « Moi, je préfère M [M, Le Maudit, 1931] ! », après que Paul (Michel Piccoli) et Camille Javal (Brigitte Bardot) lui aient dit avoir beaucoup apprécié Rancho Notorious [L’Ange des maudits, 1952], a une importance toute particulière pour moi.
6) Le plus beau visage ?
Anna Karina dans tous ses films avec Godard et peut-être plus particulièrement dans Pierrot le fou (1965).
Marianne Renoir (Anna
Karina) dans Pierrot le fou (1965)
7) Le plus beau geste ?
L’échec de la tentative d’arrêter son suicide de Ferdinand (Jean-Paul Belmondo) à la fin de Pierrot le fou.
Ferdinand Griffon (Jean-Paul
Belmondo) à la fin de Pierrot le fou
8) Le plus beau livre ?
Bien sûr, Capitale de la douleur (Paul Eluard, 1926) dans Alphaville, une étrange aventure de Lemmy Caution.
Natacha von Braun et
Capitale de la douleur
dans Alphaville, une étrange aventure de Lemmy Caution
9) Le plus beau passage musical ?
L’utilisation du Boléro de Maurice Ravel tout au long du court-métrage Lettre à Freddy Buache. A propos d’un court-métrage sur la ville de Lausanne (1982).
Jean-Luc Godard dans
Lettre à Freddy Buache.
A propos d’un court-métrage sur la ville de Lausanne (1982)
10) Le plus beau paysage ?
Au début de Pierrot le fou, lorsque Ferdinand lit le livre qu’Elie Faure a consacré à Velasquez et que Godard crée une image-peinture à partir de reflets de lumière sur la Seine.
11) Le plus grand regret ?
Concernant Jean-Luc Godard, il me semble qu’il a, au fil du temps, partiellement perdu de son sens de l’humour ce que je ne peux que déplorer.
Me concernant, je regrette de très mal connaître son œuvre après Masculin féminin (1966).
12) Le film rêvé ?
A mon sens, Jean-Luc Godard l’a réalisé. Il s’agit de Pierrot le fou.
Affiche de
Pierrot le fou
Ran
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